mercredi 1 mars 2017

Car si l'on nous sépare*** de Lisa Stromme


Éditions Harper Collins, 01 mars 2017
321 pages
Traduit de l'anglais par Séverine Beau
Titre original  "The Strawberry Girl"

Quatrième de couverture


« Je me mis au défi de prononcer son nom au grand air, marchant avec vigueur pour assourdir le son de ma voix. Je commençai par murmurer tout doucement ces deux mots qui sentaient le soufre. Puis je lâchai son nom à voix haute. Edvard Munch. »

Norvège, 1893. Le petit village de pêcheurs d’Åsgardstrånd se prépare à l’arrivée de la noblesse mais aussi à celle d’un cercle d’artistes très controversés, la Bohême de Kristiania. Tous viennent profiter du fjord, dont la lumière estivale décuple la beauté.
Johanne Lien, la fille d’un modeste fabricant de voiles, devient le temps d’une saison la servante de l’impétueuse Tullik Ihlen. La jeune femme l’entraîne dans sa passion pour Edvard Munch, dont les toiles scandalisent les estivants. Johanne est captivée par l’émotion brute qui se dégage de l’œuvre du peintre et accaparée par la liaison secrète qu’il entretient avec Tullik. Mais très vite, elle comprend qu’elle devra dissimuler bien plus que des rendez-vous amoureux…

Lisa Stromme est née dans le Yorkshire en 1973, et a étudié à l’Université de Strathclyde, à Glasgow. Elle vit en Norvège avec son mari et ses deux enfants non loin d’Åsgardstrånd, le petit village côtier où le peintre Edvard Munch avait l’habitude de passer ses étés. Car si l’on nous sépare est son premier roman.

Mon avis  ★★★☆☆


Sensuel et captivant (au début) ... Lisa Stromme s'est inspirée des peintures d'Édouard Munch pour créer cette belle histoire d'amour et de passion, que j'ai aimée lire; et pourtant, une petite semaine après avoir refermé ce livre, je me dis qu'il m'a manqué ce petit quelque chose qui aurait pu rendre cette histoire davantage fascinante. Un brin plus de psychologies des personnages peut-être.
Je connaissais Edvard Munch et plus particulièrement son "Cri". Lisa Stromme en fait une analyse intéressante, personnelle, qui s'intègre parfaitement bien dans l'histoire entre Edvard Munch et Tullik, cette jeune femme, belle et fragile, devenue sa muse. L'auteure donne une âme à ce tableau, et c'est assez fascinant.
Lisa Stromme nous décrit aussi l'atmosphère d'une époque dans un petit village nordique, où l'on se méfie des qu'en dira-t-on, où le regard des autres importent énormément, où dévier du "droit" chemin prend vite des allures de scandale. «Nous devrions suivre ceux qui sont lumière, qui nous montrent le chemin. Mais que faisons-nous ? Nous les persécutons. Les gens ignorent la lumière, ils préfèrent l'obscurité.» Munch n'est pas très populaire dans ce village, il est associé au cercle d'artistes de la Bohême de Kristiana, qui fait à l'époque outrage aux bonnes moeurs.
Le personnage de Johanna Lien, la cueilleuse de fraises, est attachant. Elle fréquente Edvard Munch, avec qui elle peut partager librement sa passion pour la peinture, et devient la confidente de Tullik.
Un bon roman, original, qui m'a absolument captivée au début, mais pour lequel mon engouement s'est un peu essoufflé au fil des pages, irritée certainement par les nombreux clichés qui étouffent les splendides passages sur l'art, les couleurs.
Je remercie Babelio et les éditions Harper Collins, ce fût un bon moment de lecture malgré tout, et je n'hésiterai pas à recommander ce livre.
J'ai hâte de rencontrer Lisa Stromme, ce soir, et de l'écouter parler de ce roman, de son inspiration, et de pouvoir partager cette lecture avec elle. Double merci !

Le Cri - Edvard Munch 
«Je songeai à Thomas, avec ses envies de parcourir le monde, de naviguer jusqu'à des terres lointaines et de rentrer au pays couvert d'or et de bijoux. Comment pouvait-on rêver d'un avenir si différent du moment présent et s'imaginer les réconcilier grâce au passage du temps ?
J'essaye de peindre les questions insolubles que nous pose l'existence, toutes ces choses qui nous laissent perplexes. J'essaye de peindre la vie telle que nous la vivons.
- Non, non, les gens ne remettent pas en cause votre technique. Mais ils disent que ce que vous faites est grossier et vulgaire.
- La vérité paraît souvent vulgaire, vous ne croyez pas ? Et les mensonges brillent parfois comme une belle nuit d'été.
Je caressai la toile, tamponnai la peinture à légers coups de pinceau et restai à l'écoute, comme s'il ne s'agissait que d'une longue conversation avec moi-même.
Mon père disait toujours qu'il y avait bien des manières de pénétrer dans la forêt. L'on pouvait y entrer en courant, le coeur ouvert à tous les possibles, sans savoir ce qui vous attendait au prochain tournant; ou l'on pouvait aller d'un pas tranquille, en devisant et en riant avec des amis, insensibles aux bruits discrets de la forêt; ou encore flâner au bras d'un amant, à la recherche d'un refuge pour des instants volés à deux. L'on pouvait enfin s'y glisser silencieusement, attentif au moindre souffle de la forêt, dans un état de communion magique et d'osmose muette de la nature.
-Il utilise l'alcool pour brouiller les contours.
-Les contours de quoi ?
-De la vie [...].
Mais saurait-il vraiment me comprendre ? Ce besoin viscéral de peindre, les sentiments qui s'agitaient en moi, tout ce que Munch m'avait appris. Thomas allait-il m'ôter tout cela ? Devrais-je renoncer à mon âme pour devenir sa femme ?
Nous pouvons en y contraignant notre imagination, faire naître en nous dans l'obscurité les images les plus claires. (Traité des couleurs, JOHANN WOLFGANG VON GOETHE)»

Lisa Stromme introduces "The Strawberry Girl"

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